Elder - Omens

Chaleur et Douceur sont les nouveaux maîtres mots chez Elder

Chroniquer un album n'est jamais chose aisée. Essayer de trouver les mots justes, sans être redondant, ce sont des difficultés que l'on essaye de surmonter. Et chroniquer la sortie de son groupe préféré est encore plus complexe. L'objectif est d'être impartial afin vous donner envie d'écouter la musique proposée sans non plus tomber dans la bête adulation.

Elder est un groupe baignant dans l'atmosphère propre du Stoner. Offrant à son auditeur d'intenses voyages grâce à des productions longues, chose commune lorsqu'on parle de ce genre musical. Ils ont réussi à se démarquer avec différents albums démontrant leur talent pour composer de profonds morceaux alternant entre partitions complexes et passages apaisants. Le but recherché est de proposer une explosion sonore pour l'auditoire. C'est ce qui a propulsé les musiciens comme maîtres du riffing et tête de proue du Stoner progressif. Le dernier album en date du groupe, n'est pas en reste de cette description, et continue de démontrer leur efficacité dans la création de paysages sonores idylliques, fleurtant ce coup-ci avec le Rock psychédélique.

Le quatuor, d'origine américaine a vu son succès grandir depuis le début de la décennie précédente, fort d'une poignée d'albums tous réussis. Dead Roots Stirring sorti en 2011 lancera leur renommée grâce à un Stoner/Doom où chaque morceau projette l'auditeur dans une odyssée toujours réussie. Ce qui frappe avec leurs compositions, c'est l'alchimie parfaite des musiciens. Une symbiose permettant à chaque instrument de créer une cohésion qui leur est propre et permet d’enchaîner des pistes plus efficaces les unes que les autres. D'excellentes galettes (Lore et Reflections Of A Floating World) vont approfondir cette exploration et s’inscrire dans cette continuité sonore.

Cependant, voilà 3 ans que le groupe connait quelques changements de vie internes. En 2017, Nick DiSalvo, guitariste et chanteur du groupe part s'installer à Berlin. Puis en 2019, le premier changement de line-up du groupe intervient : Matt Couto, le batteur (qui avait fondé le groupe en compagnie de Nick et de Jack Donovan à la basse) quitte la formation. Il est remplacé quelques jours plus tard par Georg Edert. Cette même année, le groupe vient agrémenter sa discographie d'un EP à la musicalité très différente de ce qu'ils nous proposaient. Baptisé The Gold And Silver Sessions, le disque de 3 titres s’inspire beaucoup plus du Krautrock et du Rock Prog instrumental et sert de base de départ pour le futur du groupe. Cette suite prenant justement forme avec Omens.

Le changement de ton est direct. Alors que le groupe avait pour habitude d'ouvrir ses galettes avec un accord de guitare ne nous laissant même pas le temps de nous mouiller la nuque, ici, la chanson éponyme ouvre l'album avec un clavier lointain en "fade-in". Ces notes analogiques vont faire place à un enchaînement de riffs démontrant d'emblée que le groupe n'a rien perdu de sa superbe sur sa manière de mettre au monde des compositions efficaces. Ayant annoncé le changement de ton avec l'EP de 2019, ici le Stoner est plus doux, moins abrasif qu'a l'accoutumée. Place est mise à des notes atmosphériques et des arpèges calmes plus nombreux qu'auparavant. En particulier sur des morceaux où le synthétiseur, tenu par Michael Risberg, tient le rôle de maître de cérémonie, en lieu et place du traditionnel trio gagnant guitare/basse/batterie.

A ce jeu, c'est le morceau Halycon qui détient la palme. En plus d'être le plus long du disque, 12 minutes au compteur, l'ouverture du morceau prends un tiers de la durée. Toute l'introduction est orchestrée par ce piano mettant cap sur les territoires du psychédélisme. C'est dans cette piste que les influences beaucoup plus diverses qu'on choisi les musiciens se font entendre. C'est une nouvelle réussite foisonnant d'effets en hommage au krautrock mélangée avec de légères teintes de post-rock .

La piste suivante, Embers, sert de mémoire pour les fans de la sonorité de leurs précédentes performances, avec un net changement dans le timbre de la voix de Nick DiSalvo. Si autrefois, son chant n'était pas particulièrement mis en avant, servant d'accompagnement sonore plus que pour évoquer des histoires, la production a ici décidé de lui donner une tout autre place . C'est dans ce cas que se trouve le principal débat concernant ce disque. Nick, il est vrai, ne possède pas la plus belle voix de la scène et cela se ressent d'avantage sur cet album. Et elle représente chez certains un effet rédhibitoire pour apprécier pleinement les compositions offertes. Sur ce point, c'est principalement sur les premiers couplets d'Embers où un léger désaccord entre les paroles et la partition se fait entendre. C'est une impression vite balayée avec l'arrivée du refrain. Ce morceau, sorti en éclaireur avant la sortie d'Omens, combine le côté inondation de riffs offrant un fort potentiel à l'auditeur de pratiquer sa danse de stonerhead préféré : le balancier. Le final offre une nouvelle démonstration qu'Elder sait maîtriser les jams psychédéliques. One Light Retreating vient clôturer le voyage, offrant une conclusion réconfortante de par ses arpèges utilisant à plein potentiel l'alchimie des artistes, que le changement de batteur n'a en rien ébranlé. Ceux-ci nous offrent une musique chaleureuse, le Doom des premiers albums est perdu pour laisser place à une production plus claire et apaisante, se prêtant très bien pour une écoute estivale. Ces deux pistes sont un parfait résumé de ce qu'on peut dire de ce disque.

Omens est un renouveau pour Elder mais pas un total changement artistique pour autant. D'une avalanche de riffs et de stoner progressif, on est passé à un rock consolateur et psychédélique. Comme un vieil ami qu'on accueille chez soi après plusieurs années. On s’aperçoit que ce dernier bien qu'ayant changé de style n'a pas changé de mentalité pour autant. Le changement de vie qu'a connu les membres se fait ressentir. Avoir quitté les grandes mégalopoles d'Amérique du Nord pour rejoindre Nick à Berlin et découvrir la vie plus tranquille en Europe leur a ouvert des portes vers des contrées encore inexplorées, aussi bien géographiques que musicales.

En résulte une nouvelle production mirifique et chaleureuse prouvant encore une fois que même avec un virage artistique qui s'amorce en douceur, Elder est une perle du Stoner a écouter sans modération.

RiffingIndice de la qualité technique. 1/5 : Bof bof, même votre petit frère ferait mieux. 5/5 : Ok Steve Vai, on te laisse faire
TempératureIndice du mood général de l'album : 1/5 = froid, musique globalement maussade, négative, voire violente 5/5 = chaud, musique très joyeuse voire festive
EfficacitéLa capacité de l'album à capter et maintenir l'attention de l'auditeur. 1/5 : Vous écoutez l'album d'une oreille 5/5 : L'album vous jette des étoiles dans les yeux et retient toute votre attention
Consigne du maître nageur :
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Slip de bain

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Elder
"Omens"