Lightwork à partir des singles

3 morceaux pour donner la couleur

L'activité récente de Devin

Après avoir sorti l'album The Puzzle lié à la période pandémique et ses traumas, la prochaine étape pour Devin Townsend (artiste canadien prolifique) n'était pas facile à prédire. L'album avait reçu une réception mitigée attendue, étant assez expérimental et possédant un film dédié qui n'est pas encore sorti. Ce projet Puzzle fut un véritable casse-tête pour son géniteur. Il fut le résultat de longs mois acharnés à bâtir un objet multimédia cohérent basé sur le travail collectif d'une quarantaine d'artistes. Ce n'était pas une mince affaire.

La comparaison que l'on peut faire avec son passé est celle de la création des premiers albums du Devin Townsend Project, labeur gargantuesque notamment à cause de l'album Deconstruction. Une fois que ce disque fut sorti et les tournées de soutien effectuées, Devin prit un tournant artistique dont il a le secret. Fini le metal prog tendance chaotique et cryptique. Nous sommes passés au rock accessible en un clin d'œil. Epicloud était cet album rock FM, sorti à peine un an après Deconstruction.

En 2022, un an après The Puzzle, un premier single nous tombe dessus. Puis un deuxième. Puis un troisième. Ces singles annoncent un album dénommé Lightwork sensé sortir le 4 novembre. Que donnera-t-il ? Penchons nous sur ces trois morceaux pour essayer de deviner.

Moonpeople - Carte de visite rassurante

Le moins que l'on puisse dire, c'est que la nouvelle direction semble assez transparente dans ce morceau. La musique est douce avec cette pointe de langueur morose que sait si bien transmettre Townsend. La compo évite les digressions. Mieux : elle annonce qu'elle va volontairement s'écarter de la complexité. La preuve en est le passage contenant un "Stop it." plat planté au milieu d'une transition un peu chaotique. Le morceau reprend après directement sa marche paisible, allant crescendo.

Le riff principal est signé Townsend. Il est simple, accrocheur et colle au crâne immédiatement. La même chose peut-être dite du refrain, timide au début puis chanté haut et fort sur la fin du morceau. Le choix est assumé. La voix est mise en avant dans le mix, le morceau est même très léger par rapport au mur de son Townsend-esque typique de la majorité de ses albums. Il contient néanmoins d'agréables petites structures mise en arrière plan du mix, ce qui est très rassurant pour des fans de la première heure. La musique reste riche.

Avec un clip façon marche solitaire initiatique, la thématique d'un retour à la simplicité semble elle aussi posée.

Ce single, nous ne vous apprenons rien, a de bonnes chances d'être une carte de visite pour le reste de l'album. Vu qu'il s'agit de Devin, il faudra s'attendre à des variations tout de même, mais on semble se diriger vers une musique effectivement plus accessible.

Call Of The Void - Anthem en pyjama

Immédiatement, même son de sirène maritime que pour Moonpeople. Ensuite on enchaîne avec une touche ambiant. Vient alors une guitare posant un riff léger qui illumine de suite le morceau. Il est un peu plus joueur, moins séquencé que Moonpeople. Point commun avec ce dernier : le refrain est encore très accessible. Au moment de ma première écoute, il m'a paru très clair qu'il pourrait avoir sa place sur un album comme Epicloud. Seulement, juste après, j'ai pensé qu'il est trop détendu pour cela.

L'autre gros point qui se dégage après ce deuxième single est qu'un ressenti serein, très posé même, va probablement dominer l'œuvre. Le morceau se laisse quand même des libertés : il éclate bien quand il veut mais il y a comme un couvercle. On a quelque peu l'impression qu'Epicloud a été mis sous un plaid. Le clip reflète aussi cela, malgré des choix esthétiques "particuliers" (les habitués de Dev ne seront pas choqués cependant). Nous avons ensuite attendu un peu de voir l'ultime single pour étoffer un peu cet avis.

Lightworker - Anthem tout court ?

Lightworker débarque le 25 octobre, une semaine avant l'album complet. Après la première écoute, il parait être plus proche d'un morceau single classique tel que Spirits Will Collide* sur la forme. Un refrain épique qui tombe rapidement affublé d'une mélodie qui reste en tête. On répète ça deux fois en faisant progresser légèrement l'intensité des couplets, et le tour semble joué. Sauf que le morceau grimpe assez vite sur des hurlements plutôt agressifs en contraste clair avec ce qui a précédé. Notre compositeur dégarni s'est peut-être trouvé trop gentil sur les deux premiers singles. Le couvercle précédemment mentionné est levé.

Ce passage, que l'on trouve la performance à son goût ou non, donne un bon relief au morceau. Lorsque le chant clair revient, il lui confère une bonne pêche qui porte la piste jusqu'à son terme. Nous ne parlons pas de recettes révolutionnaires, mais lorsque ça fonctionne il faut bien le souligner.

Niveau clip, c'est clairement celui qui a reçu le plus de budget. De là à dire que c'est incontournable, il y a un pas que je ne franchirais pas. Il y a l'effort de mettre un petit scénario qui colle à l'esthétique de l'album, et pousse un petit message d'espoir raccord avec ce morceau "feel good" efficace.

Ce dernier single me marque moins, je trouve clairement un effet "déjà-vu" que j'espère ne pas ressentir trop sur le reste de l'album. Néanmoins, les deux premiers singles me rassurent un peu sur ce point.

Ce qu'on peut attendre de Lightwork

Si l'on se base sur les propos dans la presse du Canadien et sur ces singles, la direction est claire. Lightwork va effectivement toucher à nouveau à des structures que Devin Townsend commence à bien maîtriser. Composer un morceau accrocheur et vivant qui reste en tête avec un riff qui tue, il sait faire il n'y a pas de problème.

Là où nous pourrions voir des différences avec ce qui a été vu précédemment serait dans les moyens mis sur cet opus. Ce qu'on entends sur Moonpeople est peut-être signe d'un peu plus de retenue et de nuance. Cette tendance à la légèreté nous sera confirmée le 4 novembre, avec l'arrivée de l'album. En attendant, on peut se préparer avec ces morceaux, Epicloud et un petit Spirits Will Collide* , pour mieux voir ces nuances.

Cependant Devin n'a jamais eu peur de surprendre, seule l'écoute de l'album complet permettra de conclure.

* : morceau de l'album Empath
EfficacitéLa capacité de l'album à capter et maintenir l'attention de l'auditeur. 1/5 : Vous écoutez l'album d'une oreille 5/5 : L'album vous jette des étoiles dans les yeux et retient toute votre attention
FraîcheurIndice de l'apport de neuf que fait cet album. 1/5 : l'album réutilise les codes du genre et fait une bonne soupe avec de vieux pots. 5/5 : l'album invente et innove son style musical
VélocitéIndice sur la véhémence de la musique 1/5 : tranquille, on est en eaux calmes, l'écoute est paisible 5/5 : musique extrêmement énergique, l'auditeur non averti aura intérêt à bien s'accrocher
Consigne du maître nageur :
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Slip de bain

Lightwork
Devin Townsend
"Lightwork"